« Si vous aviez de la foi ! »
Jésus Christ selon saint Luc 17, 5-10
Homélie – Fidélité au cœur de l’épreuve
Frères et sœurs,
Le prophète Habacuc nous rejoint dans nos propres épreuves : « Combien de temps, Seigneur ? Violence ! » Ce cri pourrait être celui de tant d’hommes et de femmes aujourd’hui : une mère qui a fui son pays avec ses enfants, un jeune qui dort à l’hôtel social sans savoir où il sera demain, un père qui part chaque jour travailler sur un chantier, sans papiers. Et pourtant, Dieu répond par une promesse : « La vision viendra… le juste vivra par sa fidélité. » Cela veut dire que celui qui reste droit dans l’épreuve, qui continue de croire, qui ne lâche pas Dieu même quand tout semble contre lui, celui-là trouve la vraie vie. La fidélité n’est pas seulement « tenir par habitude » : c’est choisir, jour après jour, de marcher avec Dieu, même dans la nuit.
Le psaume nous invite à cette attitude : chanter, remercier, garder un cœur ouvert même dans les difficultés. Rendre grâce n’efface pas la souffrance, mais cela empêche le découragement et garde notre cœur vivant. J’ai en tête ces familles qui, malgré la pauvreté, trouvent encore la force d’inviter un voisin à partager un repas, ou ces jeunes qui se soutiennent entre eux dans leurs études. Voilà ce que veut dire « rendre grâce dans le quotidien » : trouver dans la vie simple des raisons d’espérer.
Paul, depuis sa prison, écrit à Timothée : « Ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de pondération. » Même dans l’épreuve, il y a en nous une force plus grande que nous-mêmes. La fidélité n’est pas seulement un effort à fournir : elle est une grâce déjà donnée, comme une source souterraine. On ne la voit pas toujours, mais elle est là, prête à jaillir et à donner vie quand on lui fait confiance. Je pense à ces migrants qui, malgré l’incertitude, se mettent au service des autres : traduire pour un compatriote, aider dans une association, prendre soin d’un voisin malade. Cette source intérieure, c’est l’Esprit qui les porte.
Dans l’Évangile, Jésus dit qu’une foi minuscule, comme une graine de moutarde, peut transformer le monde. La graine est presque invisible, mais elle contient une force de vie incroyable. Ainsi, la fidélité ressemble à cette semence : même fragile, même petite, elle peut devenir un arbre où d’autres trouvent refuge. Je pense à cette paroissienne âgée qui prie chaque jour pour ses enfants et ses petits-enfants. Peu de gens le voient, mais sa fidélité porte du fruit. Oui, même petite, la foi fait grandir.
Puis Jésus ajoute : « Nous sommes de simples serviteurs. » Être fidèle, ce n’est pas chercher la gloire ni les récompenses. C’est accepter de servir humblement, souvent sans être vus. Comme ces bénévoles qui préparent les repas pour des familles sans logement, ou ces personnes qui donnent de leur temps au catéchisme. Rien de spectaculaire, mais une vraie lumière dans la nuit. La fidélité, même fragile comme une petite flamme, éclaire déjà la nuit et annonce l’aurore.
Frères et sœurs, la Parole d’aujourd’hui ne nous demande pas d’être des héros. Elle nous propose d’être fidèles, simplement, dans l’épreuve comme dans la joie. Et cette fidélité, humble et persévérante, est assez forte pour faire grandir la vie autour de nous.