La Pentecôte et la fête des nations : Un même Esprit, mille visages, une seule espérance (par Peterson Alcius sj)

À Jérusalem, un vent se lève
l’Esprit brise les frontières (Ac 2, 1-11)

Le récit de la Pentecôte nous fait entrer dans un mystère bouleversant : des hommes enfermés reçoivent un souffle qui les pousse dehors, vers les autres, vers toutes les nations. Ce n’est pas seulement un bruit ou un feu, c’est une capacité nouvelle : parler dans et comprendre la langue de l’autre.

Cette capacité est peut-être le premier miracle chrétien : non pas imposer une langue commune, mais rejoindre chacun là où il est, dans ce qu’il a de plus intime, sa langue maternelle. Dieu ne parle pas en surplomb, il se laisse entendre au cœur de l’histoire de chacun, dans sa singularité culturelle. Ce n’est pas l’uniformité qui naît ce jour-là, mais l’unité dans la diversité, portée par le feu du même Esprit. Il ne suffit pas de proclamer l’Évangile : encore faut-il que l’autre puisse le comprendre comme Bonne Nouvelle.

La fête des nations
une Pentecôte incarnée dans les peuples d’aujourd’hui

Le dimanche 15 juin 2025, notre paroisse célèbre la fête des nations : un moment de joie, de musique, de couleurs, d’odeurs, de visages venus de loin mais rassemblés ici, à Saint-Denys de l’Estrée pour une même gloire, pour une même louange. Ce n’est pas une animation culturelle. C’est une théologie vivante.

Car ce que nous célébrons dans cette fête, c’est la promesse accomplie de la Pentecôte : que l’Évangile n’efface pas les cultures, mais les féconde ; que chaque peuple, chaque langue, chaque tradition a sa place dans le Royaume. C’est la Sagesse divine, selon le livre des Proverbes, qui « trouve ses délices parmi les fils des hommes » (Pr 8, 31) — elle joue avec les peuples, elle danse avec les cultures, elle se réjouit des visages pluriels de l’humanité.

En ce sens, Pentecôte et fête des nations sont indissociables : l’une révèle la naissance de l’Église dans la diversité des peuples ; l’autre manifeste que cette Église continue d’exister quand des femmes et des hommes de cultures, de langues et d’idéologie différentes se lèvent pour vivre et témoigner d’une fraternité possible dans le Christ qui fait de nous filles et fils d’un seul Père.

Un même souffle pour les détresses de tous (Rm 8 ; Rm 5)

Mais cette complémentarité n’est pas qu’un appel à la fête. Elle nous provoque aussi à l’espérance. Saint Paul nous le rappelle : l’Esprit reçu n’est pas un esprit de peur, mais de liberté et de filiation. Il fait de nous des enfants de Dieu, au milieu même de nos combats. Et aujourd’hui, les fidèles réunis dans l’église Saint-Dens de l’Estrée portent aussi des blessures.

L’amour de Dieu, répandu par l’Esprit, nous apprend à tenir dans l’épreuve, à espérer contre toute espérance. Comme le dit Paul : « La détresse produit la persévérance ; la persévérance produit la vertu éprouvée ; la vertu éprouvée produit l’espérance. Et l’espérance ne déçoit pas. » (Rm 5,3-5)

Ainsi, la fête des nations devient une liturgie du monde, un chant de foi au cœur des tensions de notre temps, une profession de foi en un Dieu qui n’appelle pas seulement des individus, mais des peuples entiers à vivre ensemble et debout.

Une Église à l’image de Dieu :
Trinité, communion, mission (Jn 16, 12-15)

Dans l’Évangile de ce dimanche 15 juin 2025, Jésus promet l’Esprit de vérité, qui nous introduira dans la totalité de la vérité, c’est-à-dire dans la profondeur de la vie trinitaire. Le Père, le Fils et l’Esprit ne sont pas enfermés dans l’identité : ils sont relation, circulation, don.

Et si nous voulions vraiment refléter quelque chose du mystère de Dieu, alors nous ne pourrions pas vivre repliés sur nous-mêmes. Nous serions appelés à vivre à la manière du souffle divin : dans l’accueil de l’autre, le respect des différences, le don réciproque.

La Pentecôte et la fête des nations nous rappellent que le repli appauvrit, tandis que l’ouverture fait vivre. Lorsque des femmes et des hommes, venus d’horizons divers, choisissent de marcher ensemble, d’écouter les voix multiples, de partager les fardeaux et les espérances, alors l’Esprit circule. C’est là, dans cette dynamique partagée, que peut naître une véritable communion — une communion qui ne gomme pas les différences, mais qui les fait dialoguer dans la confiance et le respect.

Marcher ensemble, discerner ensemble,
s’écouter en vérité :
voilà un chemin d’humanité habitée réellement
par le souffle de l’Esprit Saint.

Prions ensemble

Esprit Saint, souffle de Dieu,
Toi qui parles toutes les langues et franchis toutes les frontières,
Tu n’as pas imposé une langue unique,
Mais tu as donné à chacun d’entendre dans sa propre langue les merveilles de Dieu.
Tu n’as pas fondé une communauté uniforme,
Mais un peuple aux visages multiples, aux cultures variées, unis dans un même amour.

Merci de faire de notre paroisse une vraie Pentecôte,
Un lieu où l’étranger devient frère,
Où la différence devient richesse,
Où la foi se chante en mille accents.

Fais de la fête des nations un avant-goût de ton Royaume,
Là où ta paix et ta joie sont partagées par tous,

Nous te louons pour ta présence
qui embrase les cœurs et traverse les frontières,
et nous te prions :
que ton Royaume commence ici,
dans l’accueil, la fraternité et la louange partagée dans notre belle paroisse.
Amen

Peterson Alcius sj

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