« Il fait entendre les sourds et parler les muets »
(Saint Marc 7, 31-37)
« Effata ! » c’est-à-dire « ouvre-toi ! » cela pourrait être l’impératif catégorique qui éclaire toute vie, toute personne, toute culture, sur la terre entière… Les Jeux Paralympiques qui se terminent ce soir, peuvent être un grand levier pour nous faire entrer dans cette expérience et nous renouveler profondément.
1/ Le handicap : Cet homme n’entend pas la vibration des sons et peut difficilement entrer en communication avec autrui. Par ricochet, il ne parle pas. Il est clos sur lui-même comme tous ceux qui font la sourde oreille ou endurcissent leur cœur. Cet homme ne prend pas l’initiative de la rencontre. Ne pouvant plus entendre ni même parler de façon audible, il est devenu dépendant. En écoutant des personnes porteuses d’un handicap, on découvre qu’avec certains proches, cela se passe mal : dans une cour de récréation ou dans l’espace public, celui qui montre une différence physique ou psychique peut faire peur et déclencher une agressivité, une exclusion voire un harcèlement. L’effet de groupe peut accentuer aussi cette peur…et nous oblige à une grande vigilance pour prévenir, protéger, intervenir. En revanche, on voit dans l’histoire que raconte Marc que le sourd muet est pris en charge par des gens qui parlent à Jésus, qui le supplient de poser la main sur lui. C’est bien le rôle de la famille ou des associations de s’organiser et de prendre en charge ceux qui se trouvent dans la dépendance. C’est bien le rôle des pouvoirs publics, des chercheurs, des créateurs d’entreprises de mettre en place les structures pour ouvrir aux mal-entendants, aux mal-voyants, aux dépendants de toute sorte les transports en commun, les immeubles et les maisons, les écoles et les églises, les villes et les fêtes. Les Jeux paralympiques sont un moment formidable pour voir ce que nous avons fait pour inclure les personnes souffrant d’un handicap, mais sur tout ce que nous avons encore à faire.
2/ « Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule » : Jésus ne cherche pas la médiatisation, il veut une rencontre personnelle car la foule est souvent très angoissante pour les malentendants. Jésus veut s’engager lui-même avec tout son corps pour libérer la puissance de vie qu’il peut donner à cet homme. En mettant les doigts dans les oreilles du sourd, Jésus ouvre tout ce qui conduit à entendre avec les oreilles, l’intelligence et le cœur. En prenant de sa salive et en touchant la langue du muet, Jésus transmet par ce simple toucher la puissance de la Parole. En levant les yeux au ciel et en soupirant, : « Effata ! » c’est-à-dire « ouvre-toi ! » Jésus rejoint cet homme dans ses fermetures et les fait sauter. La vie de Dieu fait irruption, fait sauter les barrières et donne la parole. Il faudra sans doute du temps à celui qui se met à entendre pour oser parler, construire le récit de ce passage du silence à la confiance partagée, trouver les mots pour éclairer les moments d’exclusion ou de harcèlement, avoir l’humour et la fierté de pouvoir communiquer ; quand on voit des personnes handicapées physiques, psychiques ou mentales trouver le sport qui leur convient, travailler dur pour nager, courir, sauter, jouer au basket au foot ou au rugby, , tirer à l’arc avec les pieds, lancer les boules de boccia, arriver à se dépasser en compétition, recevoir pour certains des médailles : les yeux pétillent, les émotions sont fortes en eux et en nous… Nous sommes transformés. Nous sommes créés pour entendre et dire cette merveille de la vie qui circule en chaque personne.
3/ « Les yeux des aveugles se dessilleront, les oreilles de sourds s’ouvriront et la langue des bègues criera de joie » Cette prophétie d’Isaïe s’accomplit avec Jésus encore aujourd’hui et nous en sommes les témoins. Aucune infirmité ne peut empêcher la vie de jaillir. Il suffit de trouver des personnes qui y croient. C’est ce que Jésus fait quand il se met à parler à un sourd, il croit que cet homme peut entendre malgré sa surdité. Jésus ouvre une communication que le monde croyait impossible. Il ne s’agit pas seulement d’un « effet Jésus » ou d’un « effet Jeux olympiques et paralympiques », Il s’agit pour chacun de nous de devenir suffisamment ouvert pour entendre quelqu’un me parler ou plus précisément pour écouter ce qu’il a à me dire sans l’interrompre. Il y a un défi pour nous, pour les croyants, pour tous les humains de grandir en humanité et en divinité en osant vivre sans peur cette rencontre, cet art de la conversation, cette beauté de la fête qui fait danser les corps et met les cœurs en joie. C’est un projet pour notre monde que de croire que nous pouvons devenir des athlètes à part entière, des hommes et des femmes qui vont « plus loin, plus haut, plus fort, ensemble. »
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